Aux confins de la Beauce et de l’Orléanais se dresse fièrement le château de Châteaudun, témoin de huit siècles d’histoire. Il est considéré comme l’un des premiers châteaux de la Loire, bien qu’éloigné du fleuve royal. Bâti sur un éperon rocheux surplombant le Loir, le château en impose et occupe depuis toujours une situation stratégique.
La visite du monument nous permet d’admirer des éléments architecturaux de styles variés et d’ainsi percevoir la transition entre l’architecture gothique et celle de la Renaissance. L’occasion de s’émerveiller devant l’impressionnant escalier Renaissance, pièce maîtresse du château, et son décor italianisant. Le château nous réserve bien des surprises !
CONTEXTE HISTORIQUE
- Localisation : Châteaudun, Eure-et-Loir (28)
- Époques : XIIe – XVIe siècles
- Personnage emblématique : Jean d’Orléans dit Dunois
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# LA FORTERESSE DE CHÂTEAUDUN
Châteaudun tient son nom de castellum et de dunum, termes désignant une forteresse en latin et en celte. C’est au Xe siècle que Thibaud le Tricheur, comte de Tours, de Chartres et de Blois, fait édifier une forteresse à Châteaudun. L’emplacement est idéal, tant par la configuration naturelle de l’éperon rocheux surplombant le Loir que sa position géographique. Au XIIe siècle, on lui ajoute un imposant donjon.
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# LE CHÂTEAU DES SEIGNEURS DE DUNOIS
En 1391, les contés de Blois et de Dunois sont achetés par Louis d’Orléans, frère du roi Charles VI. En 1439, son fils Charles d’Orléans en fait don à son demi-frère Jean dit le bâtard d’Orléans ou Dunois, compagnon d’armes de Jeanne d’Arc.
C’est seulement à la fin de la guerre de Cent Ans que Dunois peut envisager la reconstruction du vieux château donné par son frère. Il entreprend la transformation du château auquel il fait ajouter une Sainte-Chapelle et un logis qui porte aujourd’hui son nom. Ces travaux seront poursuivis par ses descendants, les ducs de Longueville. L’aile nord avec son grand escalier est rajoutée à la construction initiale au début du XVIe siècle. Les Longueville n’habitant plus guère à Châteaudun, le château demeura inchangé jusqu’à l’extinction de la famille en 1694. Le château revient ensuite aux ducs de Luynes. C’est à partir de cette date qu’il est à demi-abandonné.
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# LE DÉCLIN DU CHÂTEAU
Un des évènements marquants dans l’histoire du château est le terrible incendie de 1723 qui anéantit la plus grande partie de la ville de Châteaudun. Le duc de Luynes ouvrit sa demeure aux victimes, ce qui endommagea l’édifice. À la Révolution, la chapelle fut saccagée, les cercueils des descendants de Dunois emportés, le mobilier dispersé et le logis transformé en caserne. En 1815, le château est de nouveau mis à mal par les Prussiens mais fut heureusement sauvé par Théodore de Luynes qui y entreprit d’importantes restaurations vers 1860. Mais les bombardements prussiens de 1870 et l’occupation qui suivit entraînèrent la ruine de l’édifice.
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# LE SAUVETAGE
Promis à une mort certaine, il fut acquis par l’État en 1938 et restauré par l’architecte Jean Trouvelot. Par miracle, le château, qui avait conservé bon nombre de menuiseries et de ferrures d’origine, garde une authenticité exceptionnelle.
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LE CHÂTEAU
# L’ARCHITECTURE – L’EXTÉRIEUR
Le château de Châteaudun nous promet une belle leçon d’histoire avec ses quatre siècles d’architecture ! Dès l’entrée dans la cour d’honneur, nous sommes éblouis par cette bâtisse imposante et remarquablement bien conservée. Et notamment par les trois escaliers à vis illustrant parfaitement les évolutions architecturales à l’approche de la Renaissance.
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L’AILE DUNOIS
Cette aile ouest, élevée entre 1459 et 1468, est constituée d’un long corps de logis élevé entre cour et jardin, et d’un second corps de logis en équerre, côté Loir. Le château abrite le premier jardin suspendu de France, inspiré du modèle italien ! Il était un lieu de détente à l’abri des regards, dédié à l’usage de Dunois et de ses proches.
L’AILE DUNOIS – LE GRAND ESCALIER GOTHIQUE
Impressionnant, cet escalier à vis est à l’imitation du « grand vis » construit au Louvre par Charles V, figure de l’architecture princière. La façade dite arachnéenne (chef d’œuvre de l’art flamboyant dans la grande tradition rouennaise) est éblouissante ! D’autant plus lorsqu’on l’entraperçoit depuis l’intérieur de la Sainte-Chapelle…
Si vous êtes attentifs, vous apercevrez au sommet de l’escalier, les pignons des lucarnes ornés d’immenses fleurs de lys rappelant que le possesseur du château est un descendant de Charles V.
L’AILE LONGUEVILLE
Cette aile nord est élevée à partir de 1510 par François II de Longueville, petit-fils de Dunois. La distribution des appartements se répète à l’identique sur les deux niveaux : une grande salle d’apparat suivie d’une chambre et d’une petite pièce à usage privé. Elle comprend aujourd’hui le même nombre d’étages que l’aile Dunois mais possédait à l’origine un étage de combles supplémentaire.
Comme vous pouvez le voir, son décor est très abondant ! Les linteaux des fenêtres s’enrichissent d’arc trilobés et de culots feuillagés, la base du toit s’agrémente d’un garde-corps ajouré porté par une corniche où apparaissent les consoles à l’antique marquant l’avènement de la Renaissance.
L’AILE LONGUEVILLE – L’ESCALIER RENAISSANCE
Impossible de manquer cet escalier monumental ! La façade de l’escalier a pour principal ornement des dais très richement sculptés dans la pure tradition flamboyante tandis que l’intérieur est orné d’un somptueux décor de motifs italianisants sur les linteaux des portes, sur les chapiteaux et sur le noyau.
Il reprend le parti de celui de Dunois avec une vis précédée de paliers formant des loggias côté cour. Mais ici, l’escalier se conclut par une magnifique voûte en berceau annulaire.
LE DONJON
Le donjon cylindrique de 31 mètres de hauteur est caractéristique de l’architecture militaire du XIIe siècle. Cette tour est parvenue presque intacte jusqu’à nous ! Elle comporte trois niveaux : les deux inférieurs voûtés en coupole, le niveau supérieur qui constituait l’habitation, était couvert de la charpente commandée par Dunois. À l’origine, comme dans tout donjon, on y accédait par une porte placée en hauteur, ici à 10 mètres au-dessus du sol extérieur.
À noter que le donjon n’est accessible qu’en visite guidée !
LA SAINTE-CHAPELLE
Ne manquez pas la visite de la Sainte-Chapelle qui renferma, autrefois, un fragment de la Sainte Croix. La Sainte-Chapelle est étonnante ! D’autant plus quand nous apprenons qu’elle a été établie en trois campagnes successives, due à une histoire compliquée… À défaut des vitraux et du mobilier disparus à la Révolution, nous pouvons admirer 15 statues de la famille Dunois , à l’origine couvertes d’une riche polychromie. Nous pouvons aussi contempler une impressionnante peinture murale représentant le Jugement dernier. Dunois dut en passer commande vers 1466, lors du mariage de son fils avec Agnès de Savoie (d’où la présence d’une sainte Agnès à la droite du Christ !).
Le Christ juge, accompagné de la Vierge et de saint Jean-Baptiste, trône au milieu des douze apôtres. Derrière eux s’insèrent plusieurs personnages nimbés et un groupe d’hommes non nimbés où se distingue un homme tenant un collier d’or qui représente peut-être le père de Dunois, Louis d’Orléans. Dans la partie basse, les morts sortent de leurs tombeaux et, tandis que des anges aident les élus à gagner le paradis, saint Michel livre les damnés aux démons de l’enfer.
# L’INTÉRIEUR
L’intérieur du château est aussi riche que l’extérieur ! Après la visite de la Sainte-Chapelle, nous découvrons les différents espaces des ailes Dunois et Longueville.
À ne pas manquer, AILE DUNOIS :
- La salle de justice : un rare exemple d’une juridiction seigneuriale de l’Ancien Régime. Elle conserve son décor du XVIIe siècle. Pour l’anecdote, Louis XIV se rendant à Chambord pour chasser, s’arrêta dîner à Châteaudun. C’est donc pour lui rendre hommage que ses emblèmes furent peints sur les parois murales de la salle : la fleur de lys et le « L » couronné. Mise à jour il y a une dizaine d’années, ces symboles de la Royauté française avaient été masqués par un badigeon lorsque cette salle de justice devint tribunal révolutionnaire en 1793.
- Les immenses cuisines, au sous-sol : voûtées d’ogives, les cheminées occupent toute la largeur des pièces.
- Le jardin suspendu : comme je vous le disais précédemment, ce jardin est le premier construit en France sur des modèles italiens.
- L’appartement des bains : espace privatif réservé à Jean de Dunois, transformé en cachots au XVIIe siècle. Nous pouvons y voir de magnifiques graffitis, témoins de l’histoire du château !
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À ne pas manquer, AILE LONGUEVILLE :
Cette aile accueille aujourd’hui un parcours dédié à l’art de la tapisserie. Le château de Châteaudun abrite une collection exceptionnelle d’une cinquantaine de tapisseries des XVIe et XVIIe siècles.
- Les appartements du duc : abritent les sept pièces de la tenture de l’Ancien Testament, tissées à Paris entre 1640 et 1650 d’après Simon Vouet.
- Les appartements de la duchesse : présentent les sept pièces de la tenture de Tancrède et Clorinde, tissées à Paris dans la deuxième moitié du XVIIe siècle par Michel Corneille.
Le saviez-vous ? La tapisserie se développe à partir du Moyen Âge, essentiellement dans la vallée du Rhin, dans le nord de la France et dans les villes flamandes. Son usage répond aux déplacements fréquents des cours princières et au besoin de décorer et réchauffer les pièces dans des demeures mal isolées.
MA VISITE DU CHÂTEAU
Je garde un excellent souvenir de ma visite du château de Châteaudun, d’autant plus que le soleil et la chaleur étaient au rendez-vous ! Cette visite fut passionnante. Comme je vous le disais en début d’article, Châteaudun est considéré comme l’un des premiers châteaux de la Loire. Il est une belle introduction à un parcours plus poussé des châteaux de la Loire.
La visite est très complète ! Des cartels avec de nombreuses informations sur l’architecture, l’usage des espaces et tout simplement sur la vie quotidienne à cette époque, sont à notre disposition tout au long de la visite. Un dépliant synthétique nous est également remis à notre arrivée. Pour une visite plus complète, n’hésitez pas à acheter le petit guide des Éditions du Patrimoine en vente dans la boutique du château. À noter que le donjon n’est accessible qu’en visite guidée pour une durée d’1h30, avec peu de départs il me semble… Pour ma part, je n’ai malheureusement pas eu le temps de réaliser cette visite, c’est bien dommage !
À la fin de votre visite, n’oubliez pas de vous rendre au pied du donjon. Vous trouverez un jardin médiéval avec quatorze carrés thématiques présentant 150 variétés de plantes connues au Moyen Age et classées par usage : médicinales, alimentaires, aromatiques et domestiques .
J’espère que cette nouvelle vous a plu. Qu’avez-vous pensé de ce château ? J’attends vos retours avec grande impatience. À très vite !
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INFORMATIONS PRATIQUES
Jours d’ouverture et horaires
- du 2 mai au 30 juin : 10h-13h et 14h-18h
- du 1er juillet au 4 septembre : 10h-13h et 14h-18h15
- du 5 septembre au 30 avril : 10h-12h30 et 14h-17h30
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Tarifs
- adulte : 6€
- gratuit pour les – de 25 ans ressortissants de l’UE
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Comments (2)
Veyssiere Bernardsays:
24 novembre 2021 at 12 h 16 minAbsolument magnifique. Merci pour cet excellent reportage.
Élodie Filleulsays:
24 novembre 2021 at 12 h 39 minBonjour,
Merci pour votre commentaire et votre intérêt. 🙂
À bientôt sur Ô Mon Château !